«Chaque artiste crée ses précurseurs. Son travail modifie notre conception du passé autant que celle du futur». Jorge Luis Borges

vendredi 17 août 2012

Vivaldi: Teuzzone sous la direction de Jordi Savall, chez Naïve


Vivaldi : Teuzzone
Paolo Lopez (Teuzzone); Raffaella Milanesi (Zidiana); Delphinae Galou (Zelinda); Roberta Mameli (Cino); Furio Zanasi (Sivenio); Antonio Giovannini (Egaro)
Naïve OP 30513 (3CD)

Teuzzone est un opera que Vivaldi composa en 1718 sur un livret d’Apostolo Zeno, souvent réadapté par plusieurs autres compositeurs de l’époque.

L’intrigue nous transporte en Chine, après la mort héroïque de l’Empereur. Une guerre de succession sert de canevas à une série d’alliances et de trahisons à quoi, bien entendu, plusieurs trames amoureuses impliquent tous les personnages dans des chassés-croisés complexes et parfois alambiqués.

La veuve de l’Empereur, Zidiana, s’allie à Sivenio et Cino, tous deux amoureux d’elle, afin de s’emparer du pouvoir en trafiquant le testament du monarque décédé, qui légauait tout son pouvoir à son fils. Zidiana est secrètement amoureuse de Teuzzone, le prince, qui lui est amoureux d’une princesse païenne, Zelinda. Il ne se préoccupe guère de politique, mais par la force des choses, finit par lutter pour obtenir son dû. La trame de fond de la Cité Interdite n’est rien de plus que cela, finalement : un décor. Tout comme les personnages d’ailleurs, dont les noms et la posture n’ont rien de chinois! L’exotisme orientalisant n’est guère présent, non plus, dans la partition de Vivaldi.

Qu’à cela ne tienne, Vivaldi réalise encore ici des petits miracles de mélodies, de drame et de passion. Teuzzone est une redécouverte musicale majeure. Le Prêtre Roux s’y dépasse en caractère et en puissance émotive.

Les solistes sont en majorité très bons, à commencer par Paolo Lopez dans le rôle de Teuzzone. Son timbre de sopraniste est clair et limpide, sa technique fluide, ses phrasés libre et naturels. J’ai beaucoup aimé Mme Milanesi dans le rôle de la comploteuse Zidiana. Son mezzo démontre assez de puissance, mais aucune lourdeur. Zelinda, campée par la contralto Delphine Galou, fait montre d’une personnalité affirmée.

La direction de Jordi Savall est un peu retenue, mais ose se laisser aller là où ça compte, en particulier dans certains épisodes marqués furioso.

Naïve continue de nous révéler d’autres fabuleux trésors de l’immense leg artistique d’Antonio Vivaldi. Ah, si cela pouvait ne jamais s’arrêter!

Frédéric Cardin

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