Liza Ferschtman, violon
Deutsche Staatsphilharmonie Rheinland-Pfalz
BDavid Porcelijn, dir.
CPO 777 437-2
On qualifie régulièrement Röntgen de « brahmsien ». Évidemment,
on ne peut nier la présence de l’esprit du grand Johannes dans la musique de
Röntgen. Mais les œuvres de ce compositeur allemand ayant vécu largement aux
Pays-Bas possèdent une qualité personnelle qui les distingue de celles de
Brahms.
Röntgen insuffle une sensualité presque charnelle à ses mélodies et à ses
orchestrations. Cette caractéristique est évidente dans le Concerto pour violon en la mineur dont les mouvements sont remplis
de thèmes accrocheurs orchestrés somptueusement. Le violon est extrêmement
présent tout au long de la partition, ce qui en fait un concerto assez exigeant
au plan de l’endurance. Le premier mouvement s’amorce sur un thème volontaire
exposé au violon solo (économiquement accompagné par quelques pizzicati des
cordes de l’orchestre). Celui-ci évolue en une ligne sinueuse aux traits
mélancoliques tout à fait charmante. Le développement se poursuit avec un
troisième thème qui se révèle plus sérieux, mais aussi un brin magique et
mystérieux dans sa déclinaison orchestrale suivante. Le mouvement continue
d’évoluer en ramenant les 1er et 2e thèmes dans des
transformations on ne peut plus romantiques, avant de conclure sur une note
affirmée.
Le deuxième mouvement est un Lento
tendre et sensible qui amène quelques références au premier mouvement tout en
introduisant du nouveau matériel mélodique. Röntgen avait une main très sûre
pour transcrire l’émotion sans inonder l’auditeur.
Le troisième et dernier mouvement, un rondeau rustique et dansant,
intègre une mélodie ancienne du folklore néerlandais, ce qui permet au
compositeur de créer de superbes passages harmoniques qui ont de plus
l’avantage d’être joliment bonifiés par la palette orchestrale de Röntgen.
La Ballade pour violon et orchestre
suit le Concerto en la mineur. Celle-ci, une longue cantilène rhapsodique de 15
minutes, est une autre jolie réussite du compositeur. L’atmosphère est
mélancolique, teintée du brouillard des mers du nord, avec quelques échappées
ensoleillées occasionnelles, telle cet épisode central vivifiant d’énergie et
d’optimisme). Le résultat est touchant et probablement un témoin de l’état
d’esprit ambivalent (épuisé et soulagé à la fois) de Röntgen au moment de la
composition (c’était en 1918, à la fin de la Première Guerre mondiale).
Le Concerto en fa dièse mineur
ne fait absolument sa date de composition (1931). Le langage est résolument
passéiste, soit éminemment romantique. Pourtant, Röntgen, dans d’autres
compositions, avait montré un degré d’ouverture certain pour la modernité
musicale de l’époque (Gershwin, Debussy, Hindemith et, dans une moindre mesure,
Schoenberg). Cela n’est tout simplement pas en évidence ici. Quoiqu’il en soit,
bien que le matériau thématique et mélodique soit moins direct et accrocheur
que dans le concerto en la mineur, la science de Röntgen demeure fort agréable
à écouter. Le premier mouvement est dramatique et un brin solennel, l’andante tranquillo qui suit n’est pas
aussi charmant que le lento de l’autre concerto, mais il ne manque pas
d’intérêt. Un très beau passage où se côtoient le soliste, les cordes et les
cors est amené vers 5 minutes, et demeure le haut moment émotif du mouvement.
Le troisième mouvement, très court, fait figure de petit caprice espiègle un
peu trop léger pour servir de finition. Il est tout de même souriant et
honnête.
J’aime beaucoup la musique de Röntgen. Ses 18 symphonies sont une
véritable mine d’or à découvrir et exploiter! Sur ce disque, le Concerto en la mineur vaut vraiment
le détour, mais également la Ballade.
Frédéric
Cardin
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