Maximilian Hornung, violoncelle
Südwestdeutsches Kammerorchester Pforzheim
Sebastian Tewinkel, direction
CPO 777 576-2
À lire la description de Victor Herbert faite dans le livret de ce disque (fort bien écrit et éminemment divertissant, pour un exercice de ce genre), on croirait y découvrir une sorte de Dumas de la musique : passionné et excessif, artiste dans l’âme et redoutable commerçant, grand mangeur et jouisseur.
Comme l’écrivain, c’est dans ses créations « populaires » que Herbert trouva le succès, bien qu’il aspirait quand même atteindre des niveaux de créativité plus élevés comme le dénotent ses tentatives d’écriture d’opéras sérieux et d’œuvres concertantes (un concerto pour violoncelle, entre autres). « J’écrirai des opéras comiques jusqu’à ce que j’aie gagné assez pour écrire ce que je veux », disait-il. Il n’arriva jamais vraiment à cette destination. Doit-on s’en plaindre? Comment savoir si des œuvres dites « sérieuses » auraient mieux traversé le temps? Ce que nous savons, par contre, c’est que la musique « légère » de Herbert, elle, possède un charme évident, qui ne se dément pas, surtout lorsqu’elle est caressé par les mains habiles des musiciens en présence sur ce disque.
C’est littéralement une production de catégorie A+ qui s’active ici à donner un lustre raffiné à cette musique que plusieurs, à tort crois-je, s’évertuent à reléguer au rang de catégorie B.
Maximilian Hornung parcourt ces pages avec un plaisir et un respect qui sont évidents. L’orchestre sous la direction de Sebastian Tewinkel appuie subtilement, sans lourdeur, le discours bon enfant de la partition soliste. Violoncelliste et chef, tous deux fort jeunes, ne semblent pas le moins du monde porter de quelconque préjugés sur ces partitions simples et souriantes qui proviennent véritablement d’un autre âge. Et c’est tant mieux, car c’est avec ouverture d’esprit que l’on doit non seulement lire ces pages, mais aussi les écouter. L’auditeur qui agira ainsi sera vite récompensé par la satisfaction assumée de la jouissance d’un plaisir coupable.
La première œuvre au programme est la Sérénade pour cordes, op.12, un petit bijou de mélodies accrocheuses, presque ingénues, et jouées avec ravissement. Le premier mouvement dira peut-être quelque chose aux mélomanes plus âgés : sa mélodie rappelle à s’y méprendre la Marche des Jouets (March of the Toys) du même Herbert, présente dans son opérette Babes in Toyland. Ce fut longtemps un pilier du répertoire des orchestres dits « Pops ».
L’ensemble de la Sérénade n’a que peu à envier aux compositions éponymes de Tchaïkovsky, Suk ou Dvorak.
Un groupe de pièces nommées Seven Pieces for Violoncello & String Orchestra poursuit dans la même veine, quoique certaines d’entre elles manifestent un caractère plus introspectif que ce qui pouvait être entendu dans la Sérénade. On n’est jamais loin ici des miniatures elgariennes du genre Chanson du soir ou Chanson du matin, excepté pour la dernière et septième entrée du groupe, The Mountain Brook, un morceau vif et léger qui clos de façon ensoleillée tout l’ensemble.
Le disque se termine avec Three Pieces for String Orchestra, un tryptique tout à fait charmant qui annonce probablement un style qui fera les belles années d’une certaine musique légère britannique du 20e siècle.
J’ai eu beaucoup de plaisir à écouter cette musique sans prétention, admirablement interprétée par des musiciens qui ont laissé toute forme de condescendance dans les coulisses, et supportée par une production de grande qualité de la maison CPO. Laissez-vous tenter.
Frédéric Cardin
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