«Chaque artiste crée ses précurseurs. Son travail modifie notre conception du passé autant que celle du futur». Jorge Luis Borges

mercredi 17 octobre 2012

Von Deutscher Seele, cantate romantique de Pfitzner chez Capriccio



Pfitzner : Von Deutscher Seele

Solveig Kringelborn, soprano
Nathalie Stutzmann, mezzo-soprano
Christopher Ventris, tenor
Robert Holl, basse
Rundfunkchor Berlin
Deutsches Symphonie-orchester Berlin
Ingo Metzmacher, direction
Capriccio: C5092

La musique de Hans Pfitzner demeure dans l’oubli de nos jours. Probablement à cause de ses opinions pro-nazies lors de la 2e guerre mondiale (qui ne l’empêchèrent pas de sauver des amis juifs!), plus qu’en raison de sa musique, somptueusement romantique et magnifiquement écrite.

La grande tradition romantique allemande imprègne totalement l’œuvre de Pfitzner. L’immense talent d’orchestrateur du compositeur vient compléter cet univers sonore opulent, magnifique, parfois grandiose et parfois aussi pastoralement intimiste. Imaginez Schumann, Humperdinck, Wagner et un tout petit peu de Mahler, tout ça habilement marié et tenu par un sens de la mélodie souvent mémorable.

Von Deutscher Seele (De l’Âme allemande) se divise en deux sections, L’Homme et la Nature puis Vivre et Chanter. La musique est ravissante, magnifiquement orchestrée et se permet des références manifestes à Bach, Debussy et Delius. Certains interludes instrumentaux sont oniriques, d’autres plus picturaux. Mais on appréciera l’écriture pour les voix, axée sur la beauté de la ligne et la puissance expressive des chœurs.

Plusieurs enregistrements existent, mais la plupart datent des années 50. Un autre, paru à la fin des années 90 sur Arte Nova, avait actualisé la lecture de cette œuvre méconnue. Mais je crois bien que cette version Capriccio fait désormais figure de référence.
Les solistes sont de très haut niveau, particulièrement Nathalie Stutzmann, impériale.

L’orchestre et le chœur de Berlin offre tout le panorama grandiose voulu par le compositeur, tout en exécutant avec grâce les épisodes fragiles et délicats. Metzmacher dirige le tout avec passablement de conviction.

Pfitzner demeure maintenu dans une obscurité injuste. Injuste en raison de la qualité de sa musique. La répugnance de ses opinions politiques devraient laisser place au plaisir sensoriel de ses partitions luxuriantes. Écouter et apprécier cette musique, ce n’est pas un acte de complicité idéologique. C’est une affirmation de la capacité de l’homme, même le plus mal avisé, à tout de même pouvoir créer de la beauté. C’est un espoir.


Frédéric Cardin



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