À la suite du formidable succès de son premier disque éponyme avec l’Orchestre Métropolitain, [gagnant d’un Félix, ADISQ 2011], pour son nouvel opus, Marie-Josée Lord propose Yo soy Maria un parcours musical exceptionnel qui va des trottoirs de Buenos Aires (Astor Piazzolla) en passant par les jardins d’Aranjuez en Espagne (Joaquín Rodrigo) et les Avenidas du Portugal.
Soutenue par un ensemble de neuf musiciens, Marie-Josée chante quelques-unes des plus belles mélodies du répertoire latin : Bésame mucho, Granada et La flor de la canela. Elle aborde également des pièces plus lyriques comme le Kyriede la Misa criolla d’Ariel Ramírez et la Bachianas Brasileiras no 5 de Villa-Lobos dans des arrangements originaux signés Simon Leclerc qui assume aussi la direction musicale de ce disque.
ATMA Classique: ACD22663, à partir du 30 octobre 2012.
jeudi 25 octobre 2012
Good Night, Good Night, Beloved le nouveau CD de Viva Voce chez ATMA Classique.
Good Night, Good Night, Beloved! offre un rare coup d’œil sur la vie culturelle à Montréal dans la seconde moitié du XIXe siècle. Sur cet enregistrement VivaVoce rend hommage au Montreal Mendelssohn Choir, un des piliers de la vie musicale montréalaise durant trois décennies. Ce qui avait débuté comme un petit groupe de parents et d’amis s’est amplifié en une société chorale de quelque 120 voix, dont les concerts annuels constituaient l’un des points forts du calendrier culturel et social du Montréal anglophone. Le Montreal Mendelssohn Choir se spécialisait dans le répertoire de la part-song anglaise. Il vénérait Joseph Gould pour lui avoir fait vivre une nouvelle expérience sonore. Après la dissolution de l’ensemble en 1894, sa bibliothèque de partitions a été léguée à l’Université McGill. Toutes les pièces de ce CD sauf « Good Night, Good Night, Beloved ! » proviennent de cette collection.
VivaVoce a été fondé à Montréal en 1998 par Peter Schubert. Gagnant de plusieurs prix, cet ensemble se spécialise dans l’interprétation de la musique classique de toutes les époques tout en développant le répertoire de la musique chorale canadienne, et ce, en commandant au moins une nouvelle œuvre à chaque année.
ATMA Classique: ACD22670, à partir du 30 octobre 2012.
VivaVoce a été fondé à Montréal en 1998 par Peter Schubert. Gagnant de plusieurs prix, cet ensemble se spécialise dans l’interprétation de la musique classique de toutes les époques tout en développant le répertoire de la musique chorale canadienne, et ce, en commandant au moins une nouvelle œuvre à chaque année.
ATMA Classique: ACD22670, à partir du 30 octobre 2012.
Levant, nouveau CD de l'ensemble Amici chez ATMA Classique.
Pour son nouvel enregistrement chez ATMA, l’ensemble Amici se tourne vers les fascinantes et mystérieuses couleurs des États du levant. Avec des musiques inspirées du Proche-Orient, le voyage commence dans les Balkans, puis se déplace vers Israël, la Péninsule Arabe jusqu’aux montages du Caucase, à la découverte d’une sélection éclectique d’œuvres de Prokofiev, Gurdjieff, Golijov et Abu-Khalil.
Depuis plus de 25 ans maintenant, l’ensemble Amici a été l’une des figures de proue dans le domaine de la musique de chambre au Canada. Ses membres fondateurs, le clarinettiste Joaquin Valdepeñas, le violoncelliste David Hetherington et, plus récemment, le pianiste Serouj Kradjian, invitent régulièrement quelques uns des meilleurs musiciens à participer à leurs concerts. Ces rencontres musicales sont l’occasion de souligner des amitiés artistiques, dont le nom même des Amici se fait l’écho, par la présentation de programmes aux horizons les plus diversifiés. Parmi les artistes de renom ayant participé aux séries de concerts de l’ensemble Amici au studio Glenn Gould mentionnons les violonistes James Ehnes, Cho-Liang Lin et Jaime Laredo, la soprano Isabel Bayrakdarian, le baryton Russell Braun, le ténor Michael Schade, et le pianiste André Laplante.
ATMA Classique: ACD 22655 à partir du 30 octobre 2012.
Depuis plus de 25 ans maintenant, l’ensemble Amici a été l’une des figures de proue dans le domaine de la musique de chambre au Canada. Ses membres fondateurs, le clarinettiste Joaquin Valdepeñas, le violoncelliste David Hetherington et, plus récemment, le pianiste Serouj Kradjian, invitent régulièrement quelques uns des meilleurs musiciens à participer à leurs concerts. Ces rencontres musicales sont l’occasion de souligner des amitiés artistiques, dont le nom même des Amici se fait l’écho, par la présentation de programmes aux horizons les plus diversifiés. Parmi les artistes de renom ayant participé aux séries de concerts de l’ensemble Amici au studio Glenn Gould mentionnons les violonistes James Ehnes, Cho-Liang Lin et Jaime Laredo, la soprano Isabel Bayrakdarian, le baryton Russell Braun, le ténor Michael Schade, et le pianiste André Laplante.
ATMA Classique: ACD 22655 à partir du 30 octobre 2012.
mercredi 17 octobre 2012
Von Deutscher Seele, cantate romantique de Pfitzner chez Capriccio
Pfitzner :
Von Deutscher Seele
Solveig
Kringelborn, soprano
Nathalie
Stutzmann, mezzo-soprano
Christopher
Ventris, tenor
Robert
Holl, basse
Rundfunkchor
Berlin
Deutsches
Symphonie-orchester Berlin
Ingo
Metzmacher, direction
Capriccio: C5092
La
musique de Hans Pfitzner demeure dans l’oubli de nos jours.
Probablement
à cause de ses opinions pro-nazies lors de la 2e guerre mondiale
(qui ne l’empêchèrent pas de sauver des amis juifs!), plus qu’en
raison de sa musique, somptueusement romantique et magnifiquement
écrite.
La
grande tradition romantique allemande imprègne totalement l’œuvre
de Pfitzner. L’immense talent d’orchestrateur du compositeur
vient compléter cet univers sonore opulent, magnifique, parfois
grandiose et parfois aussi pastoralement intimiste. Imaginez
Schumann, Humperdinck, Wagner et un tout petit peu de Mahler, tout ça
habilement marié et tenu par un sens de la mélodie souvent
mémorable.
Von
Deutscher Seele
(De
l’Âme allemande)
se divise en deux sections, L’Homme
et la Nature
puis Vivre
et Chanter.
La musique est ravissante, magnifiquement orchestrée et se permet
des références manifestes à Bach, Debussy et Delius. Certains
interludes instrumentaux sont oniriques, d’autres plus picturaux.
Mais on appréciera l’écriture pour les voix, axée sur la beauté
de la ligne et la puissance expressive des chœurs.
Plusieurs
enregistrements existent, mais la plupart datent des années 50. Un
autre, paru à la fin des années 90 sur Arte Nova, avait actualisé
la lecture de cette œuvre méconnue. Mais je crois bien que cette
version Capriccio fait désormais figure de référence.
Les
solistes sont de très haut niveau, particulièrement Nathalie
Stutzmann, impériale.
L’orchestre
et le chœur de Berlin offre tout le panorama grandiose voulu par le
compositeur, tout en exécutant avec grâce les épisodes fragiles et
délicats. Metzmacher dirige le tout avec passablement de conviction.
Pfitzner
demeure maintenu dans une obscurité injuste. Injuste en raison de la
qualité de sa musique. La répugnance de ses opinions politiques
devraient laisser place au plaisir sensoriel de ses partitions
luxuriantes. Écouter et apprécier cette musique, ce n’est pas un
acte de complicité idéologique. C’est une affirmation de la
capacité de l’homme, même le plus mal avisé, à tout de même
pouvoir créer de la beauté. C’est un espoir.
Frédéric
Cardin
dimanche 14 octobre 2012
Le Paris des Romantiques avec Le Cercle de L'Harmonie chez Naïve.
Le Paris des Romantiques
Napoléon-Henri
Reber (1807-1880) :
Symphonie no. 4
en sol majeur, op. 33 (entre 1840 et 1850 – 1ère
mondiale)
Hector Berlioz
(1803-1869) :
Rêverie et
Caprice pour violon et orchestre, op. 8 (1841)
Franz
Liszt (1811-1886) :
Concerto
pour piano no. 1 en mi bémol majeur
(1839-50)
Julien Chauvin,
violon (Gian-Battista Gabrieli, 1757)
Bertrand Chamayou,
piano (Érard, 1837)
Le Cercle de
l’Harmonie (instruments d’époque)
Jérémie Rhorer,
chef
Label :
Ambroisie AM 207
Enregistrement
public (Octobre 2011)
Durée : 55
min. 00
Nous sommes loin
d’avoir épuisé tout le répertoire romantique et ce disque
confirme, grâce à une interprétation convaincante et chaleureuse,
que le chemin sera long avant d’aboutir au recensement
phonographique complet des œuvres.
Il y a d’une
part, cette quatrième symphonie d’un compositeur pratiquement
inconnu à ce jour, Napoléon-Henri Reber, professeur au
Conservatoire de musique de Paris et membre, comme son contemporain
Berlioz, de l’Académie des beaux-arts à l’Institut de France.
Tant pour l’oeuvre que pour le compositeur, il me semble que ce
soit la première fois qu’ils apparaissent sur disque. J’y
reviendrai un peu plus loin.
D’autre part,
les interprètes et producteurs discographiques portent de plus en
plus leur attention depuis quelques décennies à l’instrumentation
plus authentique du 19ème siècle. On a beau avoir
enregistré l’intégrale de l’œuvre pour piano de Liszt
(Hyperion), on est loin du compte pour ce qui est d’une intégrale
équivalente sur un piano d’époque et qui apporterait un éclairage
exhaustif sur le son tel que l’entendait Liszt.
Quoiqu’un tel
projet serait extrêmement ambitieux, certains labels ont commencé à
mettre leur pierre à l’édifice avec des programmes entièrement
consacrés au maître hongrois. Ainsi, on retrouve chez Brilliant
Classics des oeuvres jouées sur un piano Bechstein (1860) ayant
appartenu à Liszt, chez Oehms Classics des pièces jouées sur le
Steinway (1876) donné à Wagner et chez Zig Zag Territoires la
célèbre paraphrase sur le Dies irae, intitulée Totentanz,
sur un Érard de 1886.
Et voilà que le
label Ambroisie nous présente pour la première fois sur instrument
d’époque son premier concerto pour piano (S. 124). Tout porte à
croire que la belle équipe Chamayou/Le Cercle de l’Harmonie/Rhorer
nous reviendra avec le deuxième concerto. Et ce serait heureux
puisque cette première réalisation est vraiment merveilleuse.
L’œuvre est exécutée avec brio et raffinement tout à fait en
accord avec les exigences expressives de la partition; que ce soit
dans les passages lyriques ou, par contraste, d’une passion
déchaînée, l’orchestre sait répondre à la vision perspicace du
chef. Quant à Bertrand Chamayou, qui s’est déjà signalé
favorablement dans un enregistrement précédent (le cycle complet
des Années de pèlerinage – Naïve), son aisance technique
n’a d’égale que sa souplesse d’adaptation aux divers
caractères qui composent la nature du héros romantique. Sa
virtuosité se subordonne volontiers à la poésie du discours
musical, signe de maturité artistique.
Mais ce que nous
apporte plus particulièrement cet enregistrement, c’est une
palette subtile de timbres. J’en veux pour exemple les premières
mesures, au piano solo, du deuxième mouvement : portez votre
attention sur la différence de sonorités entre les registres des
deux mains. Toujours dans le concerto, cette fois dans le premier
mouvement, à partir de 1 minute 45 : les échanges entre le
piano et les solos de divers pupitres nous offrent des couleurs
absolument charmantes.
De telles
subtilités timbrales sont perceptibles dans la Rêverie et
caprice de Berlioz notamment au violon solo qui possède parfois
le moelleux nostalgique de son cousin l’alto ou encore quand le
soliste est accompagné par les bois. Cet intermède nous est
présenté avec une sensibilité digne des plus belles pages
berlioziennes.
Mais revenons à
la symphonie de Reber, la dernière dans le genre, qui regorge aussi
de sonorités toute dix-neuvième. Leurs contours sont arrondis,
moins agressants qu’avec les instruments modernes, les cordes moins
astringeantes, les flûtes veloutées, les cuivres moins tonitruants
quoique bien présents dans les passages les plus vigoureux. On
s’étonnera que Reber ait été si vite oublié alors qu’il fut
professeur de composition au Conservatoire, inspecteur des
succursales de cette institution, nommé Chevalier de la Légion
d’honneur, auteur d’un Traité d’harmonie qui connut
plusieurs ré-éditions, et admiré de Saint-Saëns, ce dernier ayant
réalisé une transcription pour piano à quatre mains de la
symphonie en question. C’est sans doute parce que Reber témoignait
très peu d’intérêt pour la musique la plus moderne de son
époque, préférant plutôt rechercher une manière d’actualiser
l’héritage des maîtres beaucoup plus âgés qu’il vénérait
tels que Mozart, Haydn, Mendelssohn et Beethoven.
Ceci étant dit,
l’œuvre est très agréable à écouter du début jusqu’à la
fin, très habilement structurée (aucun temps mort, ni redite
inutile) et parfois empreinte de dramatisme (à cet égard, le climax
du deuxième mouvement, à partir de 7 min.33, rappelle la
culmination grandiose de l’Eroica de Beethoven, ce qui n’est
pas peu dire). Le scherzo et le mouvement final offrent sans doute
une piste de ce à quoi on pourrait s’attendre dans sa musique pour
la scène; il y a de l’entrain et de l’humour dont Offenbach et
autres maître de l’opéra comique ont volontiers pris le relais.
En conclusion,
musiciens et solistes défendent ce programme avec un engagement
vraiment sincère et surtout avec énormément de talent. Ils font
désormais partie des meilleurs représentants, du moins pour la
musique française, du répertoire romantique sur instruments
d’époque. L’aventure vient à peine de débuter et j’ai déjà
hâte au prochain chapitre, en espérant qu’ils nous feront
découvrir une nouvelle symphonie de Reber, le deuxième concerto
pour piano de Liszt, ou encore quelques perles qui attendent le
secours du Palazetto Bru Zane qui abrite le Centre de musique
romantique française et fut l’un des partenaires les plus actifs à
la réalisation de ce disque.
Guy Sauvé
Octobre 2012
vendredi 5 octobre 2012
Concertos pour flûte à bec de Mancini chez Brilliant.
Mancini:
12 Recorder Concertos
Corina
Marti, flûte-à-bec
Capella
Tiberina
Paolo
Perrone, premier violon
Alexandra
Nigito, clavecin
Brilliant
94324
Francesco
Mancini est un compositeur napolitain né en 1672. Il fut assez
prolifique avec environ 200 cantates, une quarantaine d’opéras et
beaucoup de musique de chambre à son actif.
Il
composa également plusieurs concertos pour flûte-à-bec, dont douze
se retrouvent sur ce fort bel enregistrement de la maison Brilliant.
Son
style fait écho au baroque pré-vivaldien, le jeune Albinoni entre
autres. La presque systématisation d’un mouvement fugué, ainsi
que la technique du ritornello
assez prévisible des mouvements finaux, dénotent une absence de
conscience de la « révolution » vivaldienne.
Les
concertos
sont datés de 1725, du moins le manuscrit, mais on pense que
plusieurs d’entre eux auraient été plutôt écrits vers 1715.
Déjà à cette époque, Vivaldi faisait des siennes sur la péninsule
italienne. Force est d’admettre que Mancini était donc plutôt
conservateur.
Ceci
dit, le charme simple et direct de ces miniatures enjouées fait le
plus bel effet et vous donnera certainement le sourire, si comme moi
vous aimez la musique bien construite, bien jouée et mélodiquement
attrayante.
Je ne
connaissais aucun de ces interprètes. Mme Marti est tout à fait
respectable en tant que flûtiste, bien que le grain de l’instrument
se fasse parfois un rude aux extrêmes. La Capella Tiberina offre un
accompagnement équilibré, exprimant la verve nécessaire lorsque la
partition le demande.
Franchement,
un très joli disque.
Frédéric
Cardin
Symphonie n°1 de Ben-Haim chez CPO.
Ben-Haim:
Symphonie no.1; Fanfare to Israel; Symphonic Metamorphoses on Bach
Chorale
NDR
Radiophilharmonie Hannover
Israel
Yinon, dir.
CPO
777 417-2
J’ai
toujours été très très curieux de découvrir plus avant la
musique de Paul Ben-Haim (1897-1984), né Paul Frankenburger à
Munich, émigré en Israel (alors la Palestine) à l’arrivée des
Nazis au pouvoir en 1933. Je connaissais déjà le 2e
mouvement de la Symphonie
no.1, et c’est celui-ci
qui avait éveillé ma conscience à la musique magnifiquement
construite de ce compositeur encore presque totalement anonyme.
Le 1er
mouvement de la Symphonie
est constitué d’un thème robuste et de thèmes secondaires
contrastés. L’ensemble rappelle une sorte de mariage entre Mahler
et Hindemith. L’utilisation de rythmes vigoureux propulsés par les
cordes graves est l’un des aspects résolument mahlérien. Les jeux
chromatiques et pointés des bois font office de caractère
hindemithien. Le 2e
mouvement est une merveille de romantisme tardif. Un lent crescendo
amorcé aux cordes et au hautbois (remarquable solo!) mène à un
summum expressif renforcé par les cuivres, avant de s’éteindre
tout doucement dans un crépuscule de teintes pastorales
délicieusement mélancoliques. Le 3e
mouvement, marqué presto
con fuoco, revient à des
sentiments plus expansifs et musculaires. Mahler et Hindemith, encore
une fois, mais avec un « polissage » des angles
harmoniques qui rend l’expérience « Ben-Haim » plus
cinématique que purement intellectuelle ou même émotive. Voilà
une addition majeure au corpus symphonique de tout passionné de
musique du 20e
siècle!
Fanfare
to Israel est une oeuvre de
circonstance, d’abord écrite pour des fonctions protocolaires,
puis arrangée pour orchestre symphonique. On ne fait pas de
découverte majeure ici, mais notons au passage le thème élégiaque
central qui rappelle quelque peu la célèbre et inoubliable mélodie
de l’hymne national israélien.
Les
Symphonic Metamorphoses on
Bach Chorale (« Wer nun den lieben Gott last walten”)
s’amorcent sur une transposition du thème au hautbois (pour lequel
Ben-Haim réservait certaines de ses plus belles lignes
instrumentales!). Les métamorphoses qui suivent sont très
contrastées entre sommets de puissance et économie orchestrale,
tout cela dans un langage plus moderne que dans les autres pièces
sur le disque. Le tout ne manque certainement pas d’effets et de
savoir-faire.
Je ne
saurais trop vous enjoindre à jeter une oreille attentive sur la
musique de ce compositeur habile et sensible, en particulier sa
Symphonie,
une œuvre qui mérite sa place dans n’importe quelle bonne
discothèque.
Frédéric
Cardin
Goya de Menotti avec Plácido Domingo chez Arthaus.
Menotti : Goya
Placido
Domingo (Goya); Michelle Breedt (Dona Cayetana); Iride Martinez
(Maria Luisa, Reine d’Espagne); Andreas Conrad (Carlos IV, Roi
d’Espagne); Maurizio Muraro (Don Manuel Godoy); Christian Gerhaher
(Martin Zapater); Nadia Krasteva (Leocadia/une chanteuse); Petra
Simkova (une bonne); Sergio Raonic Lukovic (Aubergiste/majordome)
Nikolaus
Adler, chorégraphie
Jesper
Kongshaug, éclairages
Steffen
Aarfing, costumes et décors
Kasper
Bech Holten, mise en scène
Radio-Symphonieorchester
Wien
Festival-Chor
KlangBogen Wien
Emmanuel
Villaume, direction
Arthaus
Musik 101 576
C’est
en 1986 que fut donnée la première de cet opéra dont l’idée fut
soufflée à Menotti par Domingo lui-même. « C’est la seule
fois, il me semble, que j’accepte une idée venant de quelqu’un
d’autre » a dit le compositeur.
L’histoire,
qui ne prétend aucunement à la vérité historique, est une sorte
de « description poétique de sa (Goya) personnalité ».
On y voit Goya, vieux, dans une taverne, tomber amoureux d’une
jeune femme aguichante, la duchesse d’Albe. Elle lui commande un
portrait et pendant les séances de pose, Goya devient de plus en
plus intensément attiré par la belle (Acte 1).
À
l’Acte 2, on voit la reine être jalouse de la duchesse et de sa
relation privilégiée avec le grand peintre. Celle-ci, rebelle et
entichée d’idées modernes (nous sommes au tournant du 19e
siècle), provoque la reine en présentant ses six caméristes,
toutes vêtues exactement comme la souveraine. Le Premier ministre
oblige Goya à faire serment d’allégeance à la reine, celui-ci
accepte. La duchesse en est fort insultée et reproche à Goya son
manque de caractère. Elle rompt avec lui.
L’Acte
3 retrouve Goya dans son atelier, retiré du monde et remplis de
remords à l’idée de n’avoir pas été, dans sa vie personnelle,
à la hauteur des idéaux et de la critique sociale véhiculés par
ses tableaux. La duchesse a été empoisonnée par la reine et Goya
fut incapable de se rendre à temps à son chevet pour la
réconforter. Mais, avant de mourir, celle-ci apparaît à Goya et
lui dit que son art transcendera le temps et réparera tous ses
doutes.
Cette
production fut crée en 2004 à Vienne, devant le compositeur déjà
très vieux. Le traitement assez sobre, mais juste, rend justice à
l’esprit des lieux, bien qu’on aurait peut-être aimé un brin
plus de flamboyance visuelle, question de bien illuminer la
somptuosité de la musique de Menotti. Le premier acte est
visuellement dénudé, la taverne en question ressemblant étrangement
à un atelier moderne. Le deuxième acte montre une cour dont
l’opulence est marquée principalement par la couleur rouge ocre
des murs, plutôt dénudés eux aussi. À cet endroit en particulier,
j’aurais aimé un peu plus d’élaboration nobiliaire dans les
décors. Le troisième acte est assez réussi. L’atelier de Goya
nous montre sur les murs quelques gravures, certaines presque
lubriques, d’autres résolument contestataires. On comprend ainsi
les remords de Goya et son sentiment d’inadéquation entre la
modernité affirmée et engagée de ses œuvres d’un côté, sa
relative discrétion dans ses relations personnelles avec le pouvoir
de l’autre.
Domingo
est le Depardieu de l’opéra. On dirait qu’il ne refuse aucun
rôle, aucun personnage, aucun défi. Et, habituellement, il s’en
sort assez bien. C’est le cas ici. Je vous avouerai par contre que
j’ai été impressionné par la performance d’Iride Martinez, la
reine, frappante de conviction et de force dominante imposée à son
entourage. Elle est dangereusement vindicative, mais sait parfois
faire preuve d’un humour cruel déroutant. Une révélation.
Michelle Breedt campe une duchesse solide, touchante (surtout dans la
scène finale où elle apparaît à Goya, dans un moment éminemment
touchant) et volontaire.
La mise
en scène de Bech Holten est assez conventionnelle, s’effaçant
presque devant l’œuvre du compositeur. Pourquoi pas, après tout?
Menotti est l’un des plus habiles hommes de théâtre du 20e
siècle!
Parlons-en
donc de Menotti. Si vous n’êtes pas familier avec sa musique,
sachez qu’elle est résolument tonale et bel
cantiste. Aucun doute
là-dessus : Menotti est un héritier avoué de Puccini, et on
l’entend dans ce Goya.
Les grandes mélodies qui embrassent l’espace sonore et harmonique
et qui survolent constamment la partition rappellent le maître
italien du début du 20e
siècle. Et vous savez quoi? C’est tellement somptueux, c’est
tellement bien construit, c’est tellement bien imbriqué avec
l’action sur scène, que ça ne peut que faire le plus grand sens.
On en ressort en se disant qu’on n’aurait pas pu imaginer une
autre partition que celle-là!
Cet
opéra, l’un des derniers de Menotti, rencontrerait beaucoup de
succès populaire s’il était présenté plus souvent dans nos
maisons d’opéra. La critique dira ce qu’elle voudra sur le
romantisme dépassé, je peux vous assurer que si vous aimez le
chant, la musique et les histoires passionnées, vous ne pourrez
qu’être conquis par cette œuvre magnifique.
Je l’ai
été.
Frédéric
Cardin
Oeuvres de Montsalvatge chez Chandos.
Montsalvatge:
Partita 1958; Cinco Canciones Negras; Calidoscopi Simfonic op.61;
Simfonia da Requiem
Ruby
Hughes, soprano
Clara
Mouriz, mezzo-soprano
BBC
Philharmonic
Juanjo
Mena, direction
Chandos
CHAN10735
2012
étant le centenaire de la naissance de Xavier Montsalvatge, un
compositeur catalan, il était temps qu’une maison de qualité nous
propose quelques titres du répertoire symphonique de ce catalan mort
à 90 ans en 2002.
Montsalvatge
a donc traversé le 20e
siècle. Il semble en avoir musicalement retenu les éléments les
plus communicatifs. Montsalvatge n’est pas un compositeur
d’avant-garde. Chez lui, on retrouve une attention aux rythmes bien
affirmés (il aimait beaucoup la musique des Antilles et de
l’Amérique latine), une préférence pour des structures et des
harmonies bien définies, un brin néo-classiques, et un amour pour
les orchestrations parfois opulentes, bien trempées dans une sorte
de post-impressionnisme assez séduisant. Tous ces éléments se
retrouvent dans un langage résolument accessible sans être trop
pastiché. On pense parfois à Britten, d’autres fois à Milhaud ou
Stravinsky.
La
Partita 1958
est en quatre mouvements séparés (Fanfare,
sarabande, Intermezzo, Final)
plutôt attractifs qui intègrent habilement des éléments latins,
un peu comme ce que Darius Milhaud pouvait faire en ce sens. Les Cinq
Chants Noirs (Cinco canciones negras)
sont franchement à découvrir. L’atmosphère douce et aimable de
ces pièces est un hommage à la moiteur des nuits antillaises. Seul
le dernier chant est enlevant, à l’image de la musique antillaise
populaire que l’on connaît. Celui-ci est également l’un des
points forts du disque. Montsalvatge aimait particulièrement cette
région et sa musique. Clara Mouriz est absolument merveilleuse. Sa
voix est souple et son aisance à traduire la beauté de ces textes
poétiques antillais, remarquable. On est littéralement transporté
sous un arbre au crépuscule, devant une mer bleue-verte. Une
révélation.
Calidoscopi
Simfonic est un condensé
d’une partition écrite pour un ballet. Montsalvatge était un
homme de théâtre, et sa musique pour cette œuvre (que je ne
connais pas) me semble très adéquatement expressive.
L’orchestration foisonne et remplit l’espace, tout en permettant
régulièrement aux différents solistes de l’orchestre de briller
dans de superbes lignes mélodiques, parfois un rien grinçantes,
mais de façon très peu aggressive.
Dans la
Simfonia de Rèquiem,
Montsalvatge tenta de traduire l’essence profonde de la messe
catholique, sans avoir recours à la voix (sauf dans le tout dernier
mouvement, Libera me,
où l’intervention de Ruby Hughes est belle comme un miracle du
Vendredi Saint). Curieusement, c’est cette partition qui voit
Montsalvatge être le moins « accessible » de tout le
disque. Les harmonies sont rugueuses, et la tension palpable. Ça
demeure une œuvre de très belle facture, mais ne vous faites pas
une idée trop affirmée sur le son de ce disque en écoutant le
requiem en premier!
Que
peut-on dire sur le BBC Philharmonic? Rien de plus qu’habituellement.
L’orchestre est parfait et sonne à la fois grandiose et intime,
lorsque nécessaire. Rien d’extraordinaire à dire non plus sur
Juanjo Mena. Sa direction est tout à fait adéquate.
Frédéric
Cardin
lundi 1 octobre 2012
Samson et Dalila de Saint-Saëns avec José Cura chez Arthaus
Camille Saint-Saëns
SAMSON ET DALILA
Samson -- José Cura
Dalila -- Julia Gertseva
The High Priest of Dagon -- Stefan Stoll
Abimelech -- Lukas Schmidt
Voice of the Old Hebrew -- Ulrich Schneider
Badisches Staatstheater Chorus and Orchestra
(chorus master: Ulrich Wagner)
Jochem Hochstenbach, conductor
José Cura, stage director and designer
Gerd Meier, lighting designer
Recorded live at Badisches Staatstheater, 22 and 24 October 2010
Samson et Dalila, parle de Ouvoir et Domination, de Trahison; de comment la «volonté de Dieu» est utilisée pour justifier des actes de vengeance... 3500 ans après l'écriture de l'apologue de Samson, rien n'a vraiment changé: la trahison est si courante que nous avons perdu le sens de son indignité: Pouvoir et domination sont encore moteurs de notre si appelée «civilisation» et tuer caché derrière un masque de Foi- de n'importe quelle Foi- est, malheureusement, toujours à la mode. José Cura.
Arthaus : Dvd 101631
SAMSON ET DALILA
Samson -- José Cura
Dalila -- Julia Gertseva
The High Priest of Dagon -- Stefan Stoll
Abimelech -- Lukas Schmidt
Voice of the Old Hebrew -- Ulrich Schneider
Badisches Staatstheater Chorus and Orchestra
(chorus master: Ulrich Wagner)
Jochem Hochstenbach, conductor
José Cura, stage director and designer
Gerd Meier, lighting designer
Recorded live at Badisches Staatstheater, 22 and 24 October 2010
Samson et Dalila, parle de Ouvoir et Domination, de Trahison; de comment la «volonté de Dieu» est utilisée pour justifier des actes de vengeance... 3500 ans après l'écriture de l'apologue de Samson, rien n'a vraiment changé: la trahison est si courante que nous avons perdu le sens de son indignité: Pouvoir et domination sont encore moteurs de notre si appelée «civilisation» et tuer caché derrière un masque de Foi- de n'importe quelle Foi- est, malheureusement, toujours à la mode. José Cura.
Arthaus : Dvd 101631
Le Grand Macabre de Ligeti, une production du Liceu chez Arthaus
György Ligeti
LE GRAND MACABRE
Piet the Pot -- Chris Merritt
Amando -- Inés Moraleda
Amanda -- Ana Puche
Nekrotzar -- Werner Van Mechelen
Astradamors -- Frode Olsen
Mescalina -- Ning Liang
Venus / Gepopo -- Barbara Hannigan
Prince Go-Go -- Brian Asawa
White Minister -- Francisco Vas
Black Minister -- Simon Butteriss
Liceu Grand Theatre Chorus and Orchestra
(chorus master: José Luís Basso)
Michael Boder, conductor
Àlex Ollé (La Fura dels Baus) and Valentina Carrasco, stage directors
Alfons Flores, set designer
Lluc Castells, costume designer
Peter van Praet, lighting designer
Recorded live from Gran Teatre del Liceu, Barcelona, November 2011.
L'opéra Le Grand Macabre de György Ligeti (1923-2006) est l'un des opéras les plus populaires de la seconde moitié du XXè siècle en termes de nombre de productions. Cet opéra remarquable par l'utilisation d'un style et d'une technique musicale inédits par rapport aux compositions antérieures de Ligeti. Composé entre 1974 et 1977 pour l'Opéra Royal de Stockholm, cet opéra est basé sur la pièce de théâtre La balade du grand macabre (1935) du dramaturge belge Michel de Ghelderode; un récit surréaliste et excentrique d'une apocalypse prochaine.
Arthaus: 101643 Dvd et 108058 Blu-ray.
LE GRAND MACABRE
Piet the Pot -- Chris Merritt
Amando -- Inés Moraleda
Amanda -- Ana Puche
Nekrotzar -- Werner Van Mechelen
Astradamors -- Frode Olsen
Mescalina -- Ning Liang
Venus / Gepopo -- Barbara Hannigan
Prince Go-Go -- Brian Asawa
White Minister -- Francisco Vas
Black Minister -- Simon Butteriss
Liceu Grand Theatre Chorus and Orchestra
(chorus master: José Luís Basso)
Michael Boder, conductor
Àlex Ollé (La Fura dels Baus) and Valentina Carrasco, stage directors
Alfons Flores, set designer
Lluc Castells, costume designer
Peter van Praet, lighting designer
Recorded live from Gran Teatre del Liceu, Barcelona, November 2011.
L'opéra Le Grand Macabre de György Ligeti (1923-2006) est l'un des opéras les plus populaires de la seconde moitié du XXè siècle en termes de nombre de productions. Cet opéra remarquable par l'utilisation d'un style et d'une technique musicale inédits par rapport aux compositions antérieures de Ligeti. Composé entre 1974 et 1977 pour l'Opéra Royal de Stockholm, cet opéra est basé sur la pièce de théâtre La balade du grand macabre (1935) du dramaturge belge Michel de Ghelderode; un récit surréaliste et excentrique d'une apocalypse prochaine.
Arthaus: 101643 Dvd et 108058 Blu-ray.