Siri
Karoline Thornhill,
soprano
Suzanne
Krumbiegel
alto
Albrecht
Sachs,
ténor
Gotthold
Schwartz,
basse
Bach
Consort Leipzig
Gotthold
Schwartz,
direction
Rondeau: ROP6038
Der Tod
Jesu n’est pas une mise en musique habituelle de la passion du
Christ. Contrairement aux passions mieux connues de Bach (par
exemple), le texte utilisé par Telemann n’est pas tiré des
Évangiles, mais a plutôt été écrit par Karl Wilhelm Ramler. Le
résultat est une sorte de commentaire affectif sur des épisodes
précis de la Passion, en particulier ceux qui impliquent des moments
émotifs forts qui sont vécus par les protagonistes. Une attention
spéciale a été portée sur les personnages « ordinaires »
qui sont impliqués dans le drame (des passants, des témoins
insoupçonnés) ou encore aux moments d’émotion intime vécues par
les personnages, plutôt que strictement sur les grandes figures
imposantes. Le librettiste a manifestement voulu rapprocher son œuvre
du public issu du peuple, et non des princes et autres gens de cour.
Telemann
s’est emparé du livret et l’a mis en musique pour une première
représentation en 1755. Le compositeur n’était pas étranger à
l’exercice des cantates sur le sujet pascal (il composa une
quarantaine de passions!). À la différence de Graun qui mit en
musique lui aussi le même texte avec un langage mélodique plus
moderne et galant, Telemann utilise la rigueur baroque pour donner
vie aux différents personnages et aux évocations de Ramler. Ceci
étant dit, Telemann apporte quelques innovations intéressantes,
particulièrement remarquées dans le traitement des récitatifs.
Ceux-ci sont en effet accompagnés par des partitions à trois voix,
ce qui est plus élaboré que dans les standards du baroque sacré.
Qui plus est, les récitatifs, plutôt que de se contenter de
propulser l’action pour arriver plus rapidement au prochain air,
expriment ici une palette plus large de sentiments et d’intimité
affective.
La
musique de Telemann est belle, mais réservée. Elle n’a pas cette
flamboyance lumineuse ni cette facilité mélodique des grands
standards du répertoire. On ne s’y ennuie pas, mais il faut
accepter d’aller à la rencontre d’une œuvre mesurée et
discrète.
Les
performances musicales sont assez belles. Les voix ont une belle
ampleur. Le Bach Consort Leipzig fait montre d’une agréable
disposition. J’ai remarqué ici et là des fausses notes. En
particulier, dans l’introduction, le cor naturel fait preuve d’une
faiblesse carrément gênante. Mais tout semble se placer par la
suite.
Pour le
congé pascal, voici une œuvre qu’il serait tentant d’explorer.
Malgré la relative obscurité de cette passion, plusieurs versions
existent sur le marché, certaines franchement stimulantes. Celle-ci
ne me donne pas l’impression d’être parmi les meilleures.
Frédéric
Cardin
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