Claus Wischmann et Martin
Baer, réalisation
C Major 709004 (Blu-Ray)
Si vous pensiez qu’entretenir un orchestre
symphonique dans une grande ville occidentale est une tâche ardue, vous n’avez
manifestement encore rien vu.
Imaginez des musiciens qui fabriquent eux-mêmes
leurs contrebasses, qui taillent et découpent leurs costumes, qui travaillent
de 5 heures le matin jusqu’au souper, après quoi ils courent à la répétition
qui se poursuivra jusque tard dans la soirée, si l’alimentation électrique
n’est pas coupée et que le groupe électrogène veut bien partir, bien sûr.
Ce documentaire est l’histoire touchante d’un
orchestre symphonique improbable, situé en plein cœur de l’une des villes les
plus chaotiques du monde, Kinshasa, en République démocratique du Congo.
L’orchestre symphonique kimbanguiste (du nom de la
religion kimbanguiste, de mouvance chrétienne, elle-même issue d’un certain
Simon Kimbangu, prophète autoproclamé de Dieu sur terre) est constitué de
musiciens autodidactes qui compensent l’approximation de leur technique par une
volonté inébranlable.
Pendant le documentaire, on suit quelques-uns des
musiciens, dont un violoniste qui est aussi électricien de dépannage, un
contrebassiste qui a appris à tailler sa propre contrebasse, une flûtiste qui
se cherche désespérément un logis abordable (quelques dollars par mois!) pour
elle et son enfant.
Il est fascinant de voir ces musiciens on ne peut
plus amateurs se dévouer totalement à la cause de leur orchestre ou être
subjugués par une symphonie de Dvorak entendue sur une vieille radio
déglinguée. En les voyant, je me suis rappelé toute l’émotion vitale et
viscérale que me procurait la musique classique lorsque je la découvrais pour
la première fois moi aussi, il y a bien des années de cela maintenant.
Ceci dit, si le sujet est captivant, on regrettera
que les deux documentaristes n’aient pas approfondi plus avant leur sujet.
Quelle est la relation véritable entre la religion kimbanguiste et l’orchestre?
Comment peut-on expliquer ce choix fait par les fondateurs de l’orchestre
d’interpréter cette musique éminemment occidentale?
On devine que l’orchestre est un symbole de
stabilité dans un monde complètement éclaté, mais aussi un tremplin offrant la
possibilité d’un épanouissement personnel rarissime dans une société qui n’en
offre que très peu, voire pas du tout. Mais jamais Wischmann et Baer n’abordent
le sujet.
Malgré ces quelques réticences, je me dois quand
même de vous encourager le plus fortement possible à vous procurer ce film. Si,
comme moi, vous aimez la musique et que vous êtes convaincu de sa puissance
émotive et de son incommensurable potentiel d’épanouissement humain,
intellectuel et spirituel, vous serez indubitablement touchés par cette Symphonie de Kinshasa.
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