Michel-Jean Sedaine : livret
William Sharp : baryton (Alexis); Dominique Labelle : soprano (Louise); Ann Monoyios : soprano (Jeannette); David Newman : baryton (Montauciel/2e Garde); Eugene Galvin : baryton-basse (Jean-Louis (le Père)/3e Garde); Tony Boutté : ténor (Bertrand/1er Garde); Darren Perry : baryton (Courchemin); Claire Kuttler : soprano (Tante Marguerite);
Andrew Adelsberger : basse (Le Geôlier)
Orchestre de l’Opéra LafayetteRyan Brown, direction
Pierre-Alexandre Monsigny est né en 1729 et mourut le 14 janvier 1817. Sa longue vie lui permit de traverser un siècle extraordinairement riche en bouleversements, tant musicaux (et artistiques) que sociaux et politiques. Il fut témoin de la fin du Baroque, l’apogée du Classicisme et les débuts du Romantisme. Il vécut sous l’Ancien Régime, la Révolution, l’Empire et la Restauration! Comment sa musique reflète-t-elle ces perturbations monumentales? Sans ostentation ni placage trop étroit sur l’agitation stylistique de la période. Il serait vain de chercher chez Monsigny un témoignage de l’évolution musicale française, dans sa facture harmonique et structurelle du moins. Car c’est à un autre niveau que se situe la contribution du compositeur à l’histoire musicale de l’Hexagone. Le rôle que la postérité retient pour Monsigny est celui de père de l’opéra-comique. C’est dans la juxtaposition d’éléments légers (tant musicaux que dramatiques) et de rigueur formelle et compositionnelle que se démarque le corpus du compositeur. C’est également dans ce mariage du « populaire » et du « savant » que l’on peut retrouver l’origine de l’opéra-comique, cette contribution éminemment française à l’art lyrique, qui participe de façon originale au développement historique de cette rencontre des « classes » artistiques présente dans toutes les cultures occidentales, du Singspiel allemand au musical de Broadway en passant par la zarzuela espagnole.
Monsigny compose Le Déserteur en 1768, sur un livret de Michel-Jean Sedaine, un collaborateur régulier. Monsigny avait déjà plusieurs succès à son répertoire, mais le Déserteur sera l’œuvre qui fera sa renommée. Il est facile de comprendre pourquoi : la musique est tout simplement délicieuse, bordée de mélodies accrocheuses et d’une orchestration sensible et raffinée. Les tempis alertes et guillerets sont entrecoupés à l’occasion d’airs tous empreints d’une douce mélancolie, et portés par une écriture sensible qui sait mettre pleinement en valeur les tessitures choisies. Chez Monsigny, la préoccupation de la clarté est évidente, tant dans l’écriture vocale qu’instrumentale. Les duos, trios et pièces d’ensemble ont une grande limpidité. Chaque voix est admirablement bien distinguée des autres, si bien que ce Déserteur offre un expérience d’écoute d’une remarquable netteté. La prise de son Naxos, très naturelle, et l’impeccable diction des chanteurs de l’Opéra Lafayette, situé à Washington D.C., contribuent aussi grandement à ce succès.
Le livret met en scène Louise et son bien-aimé, Alexis, accusé de désertion après un coup monté contre lui. Louise réussira finalement à obtenir un pardon signé du Roi, qui sauvera in extremis Alexis de la peine de mort réservée aux déserteurs.
Cette production constitue une brillante surprise, et une très agréable découverte. On souhaiterait maintenant entendre les autres opéras comiques de Monsigny (une douzaine environ), avec l’Opéra Lafayette (pourquoi pas?). Une combinaison gagnante comme celle-ci ne devrait pas être changée!
Frédéric Cardin
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