Beethoven: complete piano sonatas
Michel Korstick, piano.
Enregistré entre 1997 et 2008.
Comme bonus aussi: six variations op.34 et les quinze variations Eroica op.35
Dire de Beethoven qu'il a été l'un des plus grands compositeurs de la musique occidentale, n'ajoute rien de nouveau à ce qui est dit et écrit habituellement sur le maître de Bonn. Mais en quoi réside vraiment sa force créatrice? À mon avis, sur la façon dont il s'est approprié des formes de la période classique, dont il faisait partie, pour les mener au seuil d'une nouvelle esthétique,celle de l'époque romantique.
Dans cette évolution musicale, les sonates pour piano ont joué un rôle fondamental. Elles ont été un espèce de laboratoire d'exploration musicale où Beethoven s'est donné à toutes les recherches possibles. Evidemment pour renouveler une forme il faut d'abord la connaître sous tous ses aspects. Beethoven les a appris de Haydn lui même. En sorte de thèse de doctorat, il lui dédie ses premières trois sonates, qui, comparées à celles de Haydn, indiquent son intention d'amplification de la forme. La suite n'est qu'une évolution méthodique et continuelle pour arriver aux dernières sonates, où la frontière de l’inconnu sonore est traversée et où l'on ne peut plus revenir en arrière. Brahms, un jour, répondit à un critique trouvant sa sonate pour piano un peu "semblable" à la Hamerklavier de Beethoven:« n’importe quel imbécile peut se rendre compte de cela». En effet, cela prouvait les difficultés que trouvèrent les compositeurs de l'après Beethoven à devenir originaux dans ce domaine. Exception faite de la sonate de Liszt, il n'y eut pas beaucoup de grands changements depuis l'opus 111 de Beethoven. Il faudra attendre l'école pianistique russe, avec Scriabin, Prokofiev, Medtner et bien d'autres pour écouter du nouveau, dans un contexte encore tonal.
Michael Korstick est un des grands pianistes de l'actualité, et cette intégrale enregistrée chez Oehms, restera l'une des plus belles, claires et lucides que l'on puisse écouter. Son jeu, toujours raffiné, précis, sans aucune stridence, nous prouve que l'on est en présence d'un artiste en pleine possession de ses moyens techniques.
Oehms: OC125 (10CD)
Philippe Adelfang.