Intégrale des six symphonies, P.218-223 (1790-1818)
Franz Danzi
(1763-1826)
Orchestra della Svizzera Italiana
Howard Griffiths, chef
Durée : 117 min. 01
CPO 777351-2 (2 cds)
Distribué au Canada par Naxos
Année d’enregistrement : 2007
Né d’un père violoncelliste, un des musiciens les mieux payés du meilleur orchestre en Europe à cette époque (Mannheim), formé par celui-ci et le réputé « Abbé Vogler », on aurait pu croire qu’une bonne étoile aurait pu mener Danzi à une carrière dotée d’une ascension, sinon fulgurante, du moins ornée d’un certain éclat. Malheureusement, quelques revers de fortune ont porté de sévères ombrages à une célébrité qui semblait prometteuse.
À tant de perspectives glorieuses, les faux bonds du destin anéantirent peu à peu ses élans de compositeur (morts rapprochées de son père et de son épouse, maladie, concurrence déloyale, restrictions budgétaires décrétées par ses patrons, échecs de quelques-uns de ses opéras). Malgré tout, sa musique instrumentale connût un certain succès puisque nombre d’oeuvres furent publiées à partir de 1800.
Quant aux symphonies, les deux premières (P.218 et 219), datées de 1790 et non publiées de son vivant, sont à juste titre des œuvres de jeunesse mais qui portent déjà les traits d’une certaine originalité. Les introductions lentes revêtent une importance structurelle novatrice et les autres mouvements proposent des atmosphère variées (romance, sicilienne, intermèdes avec tonalités contrastantes, sections concertantes). La troisième (P.220), bien que publiée en 1804, est apparentée aux précédentes par des similitudes techniques et stylistiques tout en bénéficiant d’innovations formelles et texturales propres au premier groupe.
À partir de la quatrième symphonie (P.221) s’opère une démarcation très nette en termes de jeux d’harmonie déstabilisant l’affirmation de la tonalité principale et de « modulations inattendues et alternances soudaines entre majeur et mineur qui ont certainement donné du fil à retordre à ses contemporains » selon l’auteur du livret Bert Hagels. Il mentionne aussi l’audace de l’instrumentation accentuant l’usage des vents du deuxième mouvement « ressentie comme une transgression illégitime » par l’auditoire sans doute encore conservateur.
Chez les deux dernières symphonies publiées en 1818 (P.222 et 223), Danzi a laissé tomber les expérimentations harmoniques et structurelles pour privilégier un discours plus équilibré sur les plans tonal et formel. Ici la maturité s’impose avec plus de sobriété technique sans sacrifier pour autant à l’efficacité dramatique, ni à un esprit animé et parfois enjoué. Comme toujours chez CPO, le livret abonde de commentaires explicatifs qui enrichissent une écoute attentive pour qui veut saisir plus de détails de l’écriture.
Si cet exact contemporain de Beethoven avait fait carrière à Vienne, aurait-il pu accéder à une meilleure reconnaissance dûment méritée bien avant aujourd’hui ? Impossible de répondre. Une chose est sûre cependant; l’interprétation de Griffiths et de son orchestre fait grandement honneur à cette intégrale. On sera ravi par une exécution réagissant sensiblement aux moindres inflexions qui donnent tant de vie aux phrases, par une lecture alerte et intelligente des partitions qui en ressort toutes les saveurs. On ne pourra résister à écouter ces œuvres autrement qu’à seul titre de musique d’agrément pour un souper; l’interprétation est trop engageante et la matière musicale trop inspirante pour se contenter de l’entendre d’une oreille distraite.
Guy Sauvé
Juin 2011
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